La louve indocile
La Fable à, entre autres qualités, celle de rappeler au lecteur, qu'il est lui aussi un acteur de cette fable, et que d'accord ou non, sur ses conclussions, il entre, par sa lecture, dans le concert... des lecteurs. Cette louve "remastérsée" peut intéresser ceux qui s'arrêtent...un moment.
La louve indocile
Une meute de loup hurlait dans la nuit brune
Sa hargne de la terre, son angoisse profonde,
Et le museau pointé, vers l’invisible lune,
Interpellait le ciel et la nuit moribonde.
Une louve à l’écart, isolée du concert,
Observait au lointain, les lumières des villes,
Indifférente aux cris des meutes versatiles.
-Ce ne sont pas des loups, mais des chiens pathétiques,
Qui implorent des dieux incertains, disparus
Pense la louve très critique.
Comme de vieux enfants, qui regrettent leur mère,
Ils réclament au ciel, leur âge d’or perdu.
Ils marchent au pas de l’oie, domestique
Vrai… je n’aime pas leur musique.
Le chef de meute a dit à la louve indocile,
-Viens chanter avec nous, ma jolie réfractaire,
Ne joue pas les contestataires
Quand on est solitaire, c’est un jeu dangereux.
-Tu m’invites à chanter, d’une façon débile
Et tes menaces sont stériles
Moi, je n’ai jamais su hurler avec les loups,
Lui répond la louve rebelle.
-Tu dois te méfier, la Belle
Des frères de ton clan, faut craindre le courroux,
Et je sais que beaucoup te traitent d’infidèle,
Ils vont te renier, te chasser du pays,
Et je ne pourrai rien pour toi, ma mie.
Il faut leur ressembler ou alors, t’en aller.
La loi des loups, s'impose à nous.
Non, moi, je n’entre pas dans leurs querelles,
-Je suis louve et comme eux, je connais l’anxiété,
La peur de vivre, celle d’aimer,
Et j’ai connu la haine, la colère et la faim
Je sais le prix que coûte un seul morceau de pain.
Mais
Je ne demande rien, et je sais vivre seule,
J’en ai trop vu des loups, obéissants et veules,
Qui revendiquent tout, sans rien donner d’eux même,
Et dans leurs hurlements, j’entends des cris de haine
Aucun mot d’amitié, encor’ moins un « je t’aime ».
Ils préfèrent les invectives,
Et je crois qu’ils sont sourds, aux choses positives
A leurs concerts de nuit je préfère le jour
Et du soleil, le chant d’amour
Julien SABBAN